Prix de la toison d’or
2020. Année d’instabilité ? Depuis le mois de Janvier un seul mot se lit sur toutes les lèvres au niveau international : Covid.19. Ce fléau qui s’abat sur le monde, laisse inquiets, sans réponse et préoccupés Batsukh et Tserenkhangai. Ils vivent actuellement sur leur camp d’hiver/de printemps nommé Adjn Khudag. Dans cette étendue de sable et de cailloux ; ils y perpétuent la tradition de ce pays : l’élevage extensif. Ils aiment cette « immensité » environnante, « leur lieu de vie où tout le troupeau est perceptible, où il est possible de surveiller de loin ». Ils ne voudraient changer sous aucun prétexte cette existence qui rime « avec liberté ». Un travail qu’ils chérissent « sans s’en sentir esclave ». Partir d’ici équivaudrait au sentiment qu’ils nomment « la déprime de leur âme »…
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L’appel du nutag
Partir. Quitter la vie à la campagne au profit des commodités procurées par la ville ; d’illusion en désillusion. « Le climat est froid, la vie est dure sous la yourte, j’étais fatiguée du trajet pour accéder au puits ». Tsevelmaa raconte leurs premières années de vie commune, lorsqu’ils vivaient avec Batbold, son mari, au centre sum à Bogd. Elle était alors âgée de 21 ans, maman de deux enfants. Ils louaient une maison au village, Batbold partageait son temps entre sa vie d’éleveur, à une heure du domicile, et sa famille. « Je ne voulais pas laisser mes enfants à la charge de ma mère », volonté d’être présente pour leur éducation. Ainsi fut leur vie, morcelée, pendant dix ans…
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Bijou du Gobi
Le travail physique de l’éleveur sollicite de façon quotidienne tous les membres corporels. L’activité au puits en reste un exemple éloquent. Amorcer à la main, achever avec une pompe. Accroupis, tendus, flexion-extension des jambes, sollicitation mécanique des bras… les mains fragilisées par la corde, le visage brûlé par le soleil et sa permanente réverbération. C’est à travers ces efforts physiques, ces conditions de travail, que Gundo récolte ce qu’il nomme « le bijou du Gobi » en évoquant l’eau de ce paysage semi désertique de l’ouest mongol. Cette dépense énergétique éprouvante pousse Gundo, 53 ans, à affirmer qu’à titre comparatif « la poussière et le vent ne sont pas des problèmes ». La fatigue physique se fait ressentir mais il ne l’exprimera pas, la brise du vent insuffle la ténacité. Il soulignera seulement que la saison printanière est la plus laborieuse : variations climatiques dans la journée, manque d’eau, naissances et récolte des laines…
Éveil environnemental
Une vie d’éleveur déroulée au cœur d’un même campement d’hiver et de printemps, 38 années écoulées à Tsagaan Ouss. C’est derrière un sourire pudique mais enjoué que Gantumur nous conte sa vie. Leur vie. Leurs observations, leurs expériences, leurs déductions, l’évolution de leur mode de vie ancestral. Mais c’est surtout sur la disparition des pâturages qu’il s’attarde, visuelle et progressive. Notamment depuis 1995, phase de démocratisation et de glorification gouvernementale des éleveurs possédant le plus grand nombre d’animaux, ce qu’il déplore. Période clé depuis laquelle il décèle l’absence de pluie, l’accentuation de sécheresse entrainant inévitablement la perte de dizaines de plantes endémiques. La dégradation des pâturages est une menace directe pour leur survie. Il en a pleinement conscience, « le bétail et l’homme détruisent l’environnement », esquisse-t-il. Il sait qu’il en va de la responsabilité de chaque éleveur…
Fatalité
À la tombée de la nuit, un soir printanier, Uunkhbat âgé de 45 ans, d’un œil avisé cherche un chevreau disparu durant la pâture du jour. Difficile de percevoir quoi que se soit à l’œil nu dans cette immensité. Il habite avec sa femme, Oyuntsetseg, à Bor nuruu, leur campement d’hiver. Au cœur d’un écosystème semi-désertique, fait de sable et de cailloux, à quatre kilomètres de la Vallée de Khavtsgait, surplombé par la montagne Bogd qui s’élève vers le ciel en toile de fond. À cette période de l’année, mi mai, la saison des naissances vient d’avoir lieu. Comme me le fait remarquer Uunkhbat, le chevreau est peut être « caché derrière un arbuste ? »…